Aujourd’hui encore n’est pas comme il l’avait souhaité. Cette banalité le ronge et, sortir de cette routine est plus difficile qu’il n’y parait. Il a fait le tour de la ville une fois de plus, s’arrêtant devant les vitrines colorées, fuyant les gens et leurs regards mauvais, mais tendant tout d’même l’oreille pour savoir ce qui se dit. Arrivé à un coin de rue, un pub, un vacarme assourdissant à l’intérieur, une course de chevaux se déroule dans le petit écran tv, lui, il n’y a pas mis les pieds. Il s’est laissé guidé, jusqu’à l’endroit où les clameurs s’apaisent, devant le petit canal, dans un coin plutôt tranquille où l‘on entend plus la ville. Elle n'est plus que bourdonnement sourd, comme l'orage au loin qui n'arrive jamais. Il ne sait plus combien de temps il est resté là, debout à contempler l’eau stagnante et verdie par les algues. Une heure…? Deux…? Peut-être même trois. Et le soleil a commencé à tomber… Il s’est penché pour ramasser un caillou et s’amuser à faire quelques ricochets. En même temps, il rêve d’une autre vie et ce ne sont pas les idées qui manquent. Il croit dur comme fer à la réincarnation. Cette fois-ci, il n’a pas eu de chance c'est vrai, mais la prochaine sera la bonne. Il en est certain et sert le poing. C’est fou, de se sentir si fatigué, si loin du monde alors qu’il est pourtant si près. C’est stupide, de laisser ainsi couler le temps alors que, pour d’autres, il est si important. Tu n’es qu’abjection, ton existence n’est utile à personne. Le présent glisse entre ses mains comme le ferait un fin filet d’eau et ce, sans qu’il ne cherche à en retenir la moindre goutte.
L’ombre de son visage oscille légèrement sur l’eau sale. Il ferme les yeux et apprécie la caresse du vent dans ses cheveux. Prend une inspiration et fini par desserrer le poing. Pourquoi cela fait-il si mal? Aucune explication rationnelle, il se sait en parfaite santé. Alors quoi? Ça brûle, ça brûle et pourtant c’est glacé.
Il ouvre à nouveau les yeux, se poser la question ne sert plus à rien après tout. Ses yeux sont bruns, ternes, ils n’ont plus ce reflet doré qui, autrefois, rendait son regard... Disons vivant. Les lèvres ont perdu leurs couleurs, elles sont sèches, mordues par le froid, la mâchoire fermement close n'exprime aucune émotion. Le nez est droit, aquilin, la peau est pâle. Les yeux sont tristes, le regard sans vie, les cheveux un peu emmêlés, la faute au vent. Il se tient bien droit, les bras le long du corps, et il commence à marcher de nouveau. Il est l’heure de rentrer.
La chose dont il a le plus conscience est cet air, qui semble lui frôler le visage à chaque pas, et qui pourtant l’évite au dernier moment. Même le vent, n'ose s'approcher...? Sa respiration n’est plus automatique, il savoure à chaque inspiration le parfum que dégagent les fleurs parc où il se trouve à présent. A cette heure là, il n’y a plus d’enfants, seulement de vieux célibataires promenant leur chien, et un ou deux couples s’enlaçant à l’abris d’un arbre sur un banc. La terre est sèche, tellement qu’un peu de poussière se soulève à chacun de ses pas. Lalalalalala… Une mélodie dans la tête, d’où vient-elle? De nulle part, c’est un chant qui n’appartient qu’à lui. Ce sont les voix d’anges à l’intérieur même de cette enveloppe et qui peuvent résonner comme bon leur semble, puisque l'enveloppe est vide. Lalalalaaaala… Les rayons du soleil sont encore clairs mais ils se font rares à présent, la lune, elle, a bien grimpé. Bientôt, l’astre du jour s’évanouira totalement dernière l’horizon. Il ne sait pas pourquoi, ce temps lui donne envie de vanille, une glace, un bain moussant, ou de l‘encens, peu importe, l’envie devient presque irrésistible, et il s’assoit sur l’un des bancs peint de vert. En face, est installé un vieux manège aux chevaux de bois qui ne tourne plus en ce début de soirée. A défaut de vanille, il s’est allumé une cigarette. La fumée est montée vers le ciel, il a soupiré, elle s’est échappée, et le soleil s‘est couché.
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Ceci n'est pas la fin, mais j'avais envie de le couper là.