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 Appréhension. [Dara.]

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Syndel Vungh
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MessageSujet: Appréhension. [Dara.]   Appréhension. [Dara.] EmptyDim 14 Oct 2012 - 17:33

Qu'est-ce qui te fait faire ça?
Ce que tu cherches n'est pas ici.

On ne sait pas où on va.

La simplicité de l'état pur, l'évasion, la quête de coeur, le profil de bonté, tout ça, c'est plus possible. Il faut avoir un but, il faut savoir pourquoi. Pourquoi on va là-bas. Ce qu'il y a, là-bas, au moins ce qu'on espère y trouver. Vagabonder n'est plus envisageable. Une seule seconde. Il suffit de les voir, tous, frôler l'infarctus en rencontrant l'évidence. Ce qui est dit blesse. Son but premier. La naïveté n'a jamais aidé à surpasser les pensants chevronnés et rodés. Les têtes pourries et les oiseaux de mauvaise augure. On sait. On s'y fait. On vit comme ça. On avance. On sait où on va, et on ne dévie pas. On reste face à la route. Volte face prohibé.

- Non mais de toutes façons, Vladimir c'est la mafia puis c'est tout.

Pas de réponse. Le creux de ses tympans soumis au cercle de décibels qu'elle se plait à placer autour de son crâne. Sa bulle, comme elle dit. Et une fois le serre-tête revêtu, Syndel devient Belphe. Une bulle. Plus de réalité concrète. Juste des actions virtuelles et des mots crachés sans ordre.

- Dmitri à côté il s'en met plein les couilles, puis voilà, y'a rien à ajouter.

Certes. Et elle n'ajoute rien. Ce sont eux, qui ajoutent. Qui relancent. Qui poursuivent. Le raid ne se fera pas tout seul. Il leur faut ces trousses de soin. Il s'agit là de leur survie. C'est indispensable.
Quelques jours maintenant qu'il n'y a plus rien dans le camps. Les taupes ont tout raflé, ils auraient du le voir plus tôt. Elle, elle le savait et elle n'a rien dit. Elle pistait ceux qui avait l'air suspect, sans grand résultat, et pour cause. Rien ne laissait présumer un tel réseau. Les ressources pillées. Quinze jours de provisions, disparues. Plus de médicaments. Plus de désinfectant. Pas même une aspirine. Ils ont tout pris, et ils sont partis. Etant donné leur effectif, il serait suicidaire de les poursuivre. Non, il fallait reprendre du début. Changer de poste de commandement, demander aux groupuscules affiliés de l'aide, pour pouvoir reprendre les affaires. Des vraies stratégies. Certains sont venus les rejoindre, leur prêter main forte. D'autres ont sacrifié une partie de leur propres vivres pour les aider à supporter le poids de la faim. Mouvement solidaire. Gestes appréciables. Il n'y avait pas de chef. Toute parole avait le droit être prononcée, sans différence, à valeur égale. Mais certaines têtes revenaient plus que d'autres. Les nouveaux avaient du mal à être entendus, encore plus à être écoutés. Il n'y avait que ceux qui savaient qui étaient pris en compte. Des manuels, des intellectuels, des orateurs. Il fallait s'ouvrir. Les idées venaient de partout. Les idées. Le territoire avait été généré à partir d'idées diverses. Leur collision avait été féroce, mais le tout n'en demeurait pas moins efficace. Plus de caste, de rang social. Il y avait ceux qui sortaient, ceux qui ne bougeaient pas. Ni l'un ni l'autre ne pouvait survivre indépendamment. On avait trouvé l'équilibre.
Belphe était une traqueuse. Elle agissait en premier lieu dans l'enceinte des murs, en temps que tourelle. Un guet. Ses relations faisaient en sorte de la tenir au courant dès lors qu'une décision devait être soit votée, ou prise. Elle avait son mot à dire. Belphe faisait partie des têtes signataires, titulaires d'une partie de la prise de décision importante. Elle avait toujours été là. Quoi qu'il ait pu se passer, elle n'était jamais partie. Clef de voûte d'une entreprise qui sans son appui n'aurait jamais tenu, elle était le sage. La Tour. Celle qu'on va consulter. Celle qui sait. Qui sait tout. Sa parole est sacrée, Oracle. C'est Belphe. C'est elle. On se retourne sur son passage. On la salue. Certains se courbent devant elle. Les plus avides de pouvoir. Elle leur répond décemment lorsqu'ils sont décents. Elle les ignore lorsqu'ils pensent avoir une chance de la séduire. Belphe, c'est l'un des piliers de cet univers pluricéphale. Elle vise avec l'Oeil et la Main de Dieu, lorsqu'il ne s'agit pas de la foudre meurtrière du Mauvais Sang. Elle effraye. Elle inspire confiance. Elle l'ouvre, parfois beaucoup trop. Elle dirige à sa façon.
Elle devait partir sur le terrain avec les autres. Son sens de l'ordre, de l'organisation, de la répartition, de l'égalité et son esprit stratège serait d'une aide plus que précieuse.
On ne savait que penser de la route G47. Elle avait été sécurisée quelques jours plus tôt, cependant par miracle. Et il ne serait guère étonnant de voir la barricade céder à tout instant, et la Plaie se répandre à tout va. Elle était néanmoins le moyen le plus sûr et le plus rapide pour accéder à la Zone Z8, là où les attendraient les escouades armées pour les escorter jusqu'à l'emplacement des trousses de secours délivrées par le réseau Mano. La Mano était plus qu'efficace, ces temps-ci. On les avait mis sur le projet de pont à la sortie de la Z4, pour rejoindre l'île à découvrir, un peu plus loin. Le chantier avançait sans trop de peine, le groupe Onyx les débarrassant de toute intrusion nuisible à l'avancée du projet en cours. Restait que la G47 était, de loin, la meilleure solution. Devenue impraticable depuis l'incendie du jour Soixante-Deux, la E31 N'avait plus qu'à être rayée des cartes, ou reconstruite, une fois la zone liquidée, ce qui n'était pas pour tout de suite avec le peu de moyen qui leur restait. Non, la priorité restait la survie de la Cabeza. El Ojo veillerait à ce que rien de délicat ne se produise dans le secteur, et si jamais cela devait se faire, l'Onyx et la Mano seraient redirigées vers elle pour retirer toute notion de danger. La légende urbaine parlait même des feux qui ne se seraient jamais éteints. L'heure n'était cependant pas aux fables, et le feu pouvait bien brûler la zone, il ne se déplace pas. Un problème en moins.
La G47 était la solution. Quand bien même la barricade avait cédé, il suffirait d'employer les grands moyens pour tous les éradiquer. Simplement.
Simplement.
L'expédition démarrerait lorsque tous seraient prêts. Belphe l'était déjà.

- T'es en retard.
- Mais non j'suis pas en retard!
- Si tu l'es.
- Mais il est neuf heures deux! Neuf heures et deux minutes, putain!
- Le cours il commence à neuf heures, désolée, mais neuf heures deux ça veut dire que t'es à la bourre. Ramène tes fesses.
- Mais putain Syndel...!
- Quoi, qu'est-ce tu chouines? Y'a pas de "mais putain Syndel" qui tienne. Et surveille ton langage. Sors-moi ton carnet. Et sans soupirer, merci.
- Pourquoi tu me laisserais pas y aller, pour une fois? Tu sais que c'est le bus, pas moi...
- Tu m'as laissé passer, toi et ta bande de copains eunuques, quand j'voulais rentrer dans le lycée?
- Encore cette histoire, mais bordel ça fait deux mois!
- J'ai bonne mémoire, t'as vu.
- Fait chier!
- Il t'a pas suffit, le mois de colle?
- Putain mais c'est du sadisme!
- C'est apparemment ce qu'il te faut.
- J'vais tout balancer à la direction, j'te jure que tu resteras pas longtemps ici...
- Va-y, va lui dire. Si t'as que ça à foutre. Par contre, touche encore une fois à ma machine et tu récupéreras pas tes doigts. ... Joues pas avec le feu, sans rire.

Les cinq doigts tordus. Un gémissement échappé.

- ARGH! Lâche-moi, lâche-moi! ... Pardon, pardon, j'recommencerai pas, j'te jure, promis, lâche, lâââââche!
- Tu vois quand tu veux. Bon t'es pas ici chez toi, casse-toi en cours. Putain, avec le père Drake en plus, reviens pas s'il te dit de dégager, j'veux pas t'avoir ici.
- Bah tu veux qu'j'aille où sinon?
- T'iras aider les femmes de ménage à nettoyer les chiottes, abruti. Maintenant casse-toi, que j'te foute en retard.

Des insultes proférées une fois hors du sanctuaire démoniaque de Dame Syndel, régente sans pitié de la Vie Scolaire, nouveau poste attribué à son retour. Nos ne voulons pas perdre un élément aussi prometteur. Elle ignorait tout de cet "élément prometteur". Reste qu'elle promettait, apparemment. Autant en profiter.
Tu ne peux plus rien entendre d'autre.
Ils sont là. Y aller.
Connexion. Chargement. Les zones à explorer sont vastes. Larges. Longues. On s'y perd. On s'y perd souvent.

Il faut y aller. Courir, avec ton équipement sur le dos et les maigres provisions qu'il te reste. Trop nombreux. Bien trop nombreux. Séparés. Isolés. Ils vous attraperont. Ils vous jugeront. Ils expédieront ça vite, aucun intérêt. Il faudra s'échapper. S'enfuir. Se cacher. Sortir de leur creux infini. S'évader. Et être rattrapé. Jeu tendu. Respiration courte, rapide. Accélération du rythme cardiaque. Jouit d'un bonus de survie propre à ta classe. Jouis du peu qu'il te reste. La jambe en moins. Tordue. Il aurait suffit d'un bandage. Tu n'en as plus. C'est l'écorchure de trop. Le corps qui cède. La horde face à toi, lourde, pesante, les statistiques qui s'affolent.

- Bordel de merde les mecs j'suis morte.

Ça t'arrache la gorge d'avouer.
Surtout lorsqu'en face de Syndel, il y a quelqu'un.

- Je re.

Poser Belphe un instant. Retire le casque des oreilles. Ça ne sera pas long.

- Qu'est-ce que tu veux?

À votre service.


Dernière édition par Syndel Vungh le Lun 12 Nov 2012 - 4:17, édité 1 fois
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Dara Summers
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MessageSujet: Re: Appréhension. [Dara.]   Appréhension. [Dara.] EmptyDim 11 Nov 2012 - 15:38

    Nom d'une sirène sans nageoire, que j'en avais marre.

    Depuis combien de temps je m'étais installée dans ce bled ? Plusieurs jours ? Je ne comprenais rien. J'avais voulu dormir à la belle étoile, un type m'avait obligée à pieuter dans un lit trop mou, avec un colocataire insupportable. J'avais juste envie de lui démonter la tronche, mais apparemment, ce n'était pas très bien vu, dans le coin. En fait, rien de ce que je faisais n'était bien vu. Je ne savais pas lire, et en règle générale, je parlais en Ametheien. Pourquoi ? Parce que ça faisait chier les gens qui essayaient de me parler. Moi, j'avais envie de ne parler à personne. En revanche, je voulais des réponses, et la seule chose que j'avais eu en guise de réponse c'était des heu "heures de colle" auxquelles je n'avais pas été, d'une, parce que je ne savais pas ce que c'était, deux, parce que je n'ai d'ordre à recevoir de personne dans ce trou à rats. Ici, en plus, c'était moche. TRES MOCHE. Il n'y avait rien pour me plaire. Ni belles étendues d'herbe verte. Ni déserts arides dans lesquels courir. En fait, j'étais complètement perdue ici. A part le palais de Mirana, il n'y avait rien ici qui puisse s'apparenter au monde dans lequel je venais. Qui m'avait jeté un sort ? Pourquoi ? Qu'est-ce que j'avais fait de mal pour quitter mes Terres ? Certes, ici aussi, ils avaient leur lot de phénomènes. Des gens très bizarres. Qui faisaient plein de trucs bizarres, aussi. Mais peu importe. Il fallait que je sorte mon énervement de ma tête. Ou que je le fasse disparaître par le moyen que je connaissais le mieux :

    Taper.

    M'enfin. Lorsque j'avais demandé à un élève, ce matin, où je pouvais trouver des réponses quant à mon "parcours" il avait haussé les épaules, et m'avait proposé d'aller à la "Vie scolaire". La vie scolaire. Mais je n'étais pas étudiante, merde ! Quand allaient-ils enfin se mettre un peu de plomb dans la cervelle ?! Ils commençaient sérieusement à me fatiguer, ceux-là ! Vie scolaire. J'avais soixante deux ans, ils croyaient vraiment que j'avais une tronche à retourner à l'école ?! Epuisée par le fait d'avoir déjà tapé un ou deux élèves, j'avais finalement décidé de me rendre à cette fameuse "vie scolaire". Non pas pour en apprendre un peu plus sur mon inscription ici, mais plutôt pour savoir ce que je foutais là, pourquoi, et surtout, Surtout, savoir où j'étais. Parce que pour moi cet endroit était "un bled bizarre avec des gens dans des boîtes en métal peintes, et un grand château éclairé sans feu". Et encore, je pouvais en dire beaucoup sur tout ce que je trouvais étrange, ici. D'abord, ces trucs que les élèves mettaient dans leurs oreilles. C'étaient des fils colorés. Ils se protégeaient du froid avec ça ? Ces filins étaient reliés à des boitiers qui s'allumaient par enchantement. Alors, soit tous les élèves de ce monde étaient des sorciers hors pairs, ou bien il y avait un truc que je n'avais pas encore tout à fait intégré au sujet de mon nouveau monde. En fait, ça ne m'intéressait pas beaucoup. Ou du moins, ça passait au second plan. Pour le moment, je devais savoir où j'étais. Pourquoi. Et surtout. Comment rentrer chez moi.

    Aussi, lorsque je passais la porte de cette fameuse "vie scolaire" comme on me l'avait montré, quelle ne fut pas ma surprise lorsque je tombais sur une blondasse plantée devant un boitier noir, et qui parlait toute seule. Elle était décérébrée celle là, ou quoi ?


    - Bordel de merde les mecs j'suis morte.

    Ah bon. Et ils étaient où les "mecs" ? C'étaient quoi d'ailleurs, des "mecs" ? Et devais-je m'attendre à ce qu'elle s'écroule au sol, tuée par un poison mortel ? Non, elle n'en fit rien. Lorsqu'elle croisa mon regard, elle prononça une phrase de plus, vraiment étrange.

    - Je re.


    Je ne répondis pas à cette phrase. Elle était juste déglingo, celle-là. Si je chopais le fils de Gnome qui m'avait dit de venir parler à cette débile... Je la fusillais du regard, alors qu'elle s'adressait à moi, nonchalante. Elle retira un casque anti-froid de ses oreilles. Le genre de truc que nous utilisions beaucoup à la guerre. Elle ne m'inspirait pas confiance, tout simplement. Elle me rappelait quelque chose. Mais je ne savais plus quoi.

    - Qu'est-ce que tu veux ?

    Je croisais les bras, fis un pas en avant, rageuse. Pas question de me laisser hypnotiser par cette folle. Allez, respire Dara. Pas taper. Pas maintenant. Après. Dehors.

    - Savoir pourquoi tu parle toute seule. Pourquoi tu as les yeux vissés devant un genre de cadre noir. Et surtout pourquoi tu portes une protection contre le froid alors qu'on crève, dans ta piaule.


    Oui, oui, bonjour aussi. Elle ne me l'avait pas dit, elle. Je ne voyais pas pourquoi MOI je le ferais. Après tout, soit les apparences étaient trompeuses pour elle aussi, soit j'étais plus âgée qu'elle. Beaucoup plus âgée qu'elle. Donc elle me devait le respect. CQFD. D'un geste, je lui désignais les sigles, épinglés sur ma poitrine.

    - Tu vois, ça ? C'est des galons, dans la Grande Armée de Mirana Chantebois. J'suis générale, eh ouais. Le problème, c'est que je me suis retrouvée ici, j'sais pas comment. Alors puisqu'on m'a dit de m'adresser à toi, tu vas me dire où je suis, pourquoi, et surtout, comment rentrer dans le FIVE, parce que voir vos tronches de cake, habillés comme des clowns, ça me donne juste envie de bastonner les murs.


    Je m'approchais de l'endroit où elle se trouvait, m'assis sur ce que je supposais être un fauteuil, d'une matière que je ne connaissais pas. C'était froid et inconfortable. Et ça devait casser comme de rien, ce truc là. En tout cas, lorsque je m'assis, elle ne bougea pas. J'avais retenu la leçon de la dernière fois.

    - Alors, tu accouches ?

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MessageSujet: Re: Appréhension. [Dara.]   Appréhension. [Dara.] EmptyMar 20 Nov 2012 - 13:33

Je te parie que tu ne le sais pas.
Les mondes sont liés, les mondes sont connectés.

Des rangers usées. À tel point qu'elles sont déchirées. On voit le pied. Son treillis, troué de part en part, délavé, rapiécé, raccourci. On voir les mollets. Le maillot de Marilyn, yeux bicolores, I'm dying, I hope you're dying too, manches courtes, impeccable. Surmonté d'un sweat à capuche informe, manches longues retroussées, gris-verdâtre esquinté, odeur d'herbe. Un cendrier, posé sur la table basse devant lui. Trop de bordel, sur cette table basse. Pornos, console, manettes, bières, assiettes, couverts, brosse à dents, fils électriques, vêtements. Mais surtout le cendrier. À son bord, la roulée échouée, éteinte. Volets fermés. Il fait sombre, dans la pièce. Quelques lumières allumées, rien de transcendant. Le minimum. Les cuisses brûlent sous le ronronnement de la batterie. Trois jours qu'elle ne s'est pas reposée. Trois jours et trois nuits à ne pas avoir été éteint. Autant de temps à farmer pour préparer le raid. Trop de retard, il avait fallu employer les grands moyens. Pour le bien du groupe.
La vie de larme. Affalé dans le canapé, les yeux rivés sur l'écran animé. Les cheveux retenus par un bandeau de fortune, enfilé n'importe comment. Pas de problèmes, personne ne le voit. Des vacances. Il travaille, normalement. Il est en vacances, il en profite. Beaucoup de monde sur la room. Les serveurs saturent. Le prix de la popularité. On s'amuse. Des gens lui parlent, il ne répond pas. Ça fait six fois qu'il répare son microphone pour qu'on puisse l'entendre. Les pages mettent un certain temps à charger les données. C'est qu'il y en a beaucoup. La machine est pourtant rodée, un vrai tank prêt à partir à la guerre. Elle avait valu son prix, d'un côté. Elle valait bien ça. Il l'avait affectueusement baptisée Tess. C'était le prénom de sa mère. Très gentille, mais très chiante. Ça lui allait parfaitement bien. Il l'aimait beaucoup. Sa mère. Et son ordinateur. Les deux femmes de sa vie. Capricieuses, exigeantes. Pas méchantes et serviables. En jouant, il ne pouvait que chercher à les oublier. Sauf qu'un détail venait perturber son raisonnement d'une logique incomparable: en jouant, il devait faire équipe avec des femelles. Car elles sont partout, évidemment.
Il n'est pas sexiste. Juste réaliste. Les gonzesses, dans les équipes, c'est chiant. Ça parle, ça change de stuff n'importe comment sous prétexte que telle arme va mieux avec telle tenue, ça braille, ça râle, ça s'entend pas avec les gens, ça fait n'importe quoi. Il n'y avait qu'une seule fille qui était digne d'être dans l'équipe. L'une des seules de l'équipe, d'ailleurs. Et c'était Belphe.

Callya Belphegora, pseudo compliqué pour éviter d'avoir à en chercher un pendant vingt minutes. Une vraie meneuse. Elle, elle s'en fout d'avoir les chaussures de chantier avec le gilet pare-balles. Même si c'est vrai que ça ne va pas du tout ensemble. On n'est pas là pour séduire, on est là pour jouer. Et ça, Belphe, elle le rappelle à tout le monde. Belphe, c'est un peu la maman du groupe. On fait rien sans elle. C'est pourtant pas la HL de la troupe, celle avec les plus hautes stats ou quoi. Elle est un peu la mascotte, en plus d'être utile. Tout le monde l'apprécie, Belphe. On l'aime bien.
Dauphin, surtout, il l'aime beaucoup.
La fumée monte lorsqu'il tire sur l'herbe. Les mèches rebelles sont maintenues à l'aide d'un simple élastique. Les tissus tiennent suffisamment chaud. Les pâtes sont finies, le café aussi. Bière décapsulée, assis en tailleur. C'est maintenant, le raid. Maintenant.
Belphe a à peu près tout prévu. La G47. Risqué, mais dans l'état, ce n'est pas comme si plusieurs solutions sûres s'offraient d'elles-même. Soixante-deux connectés. On en attendait pas tant. Le mail de masse avait su ramener foule, c'était tant mieux. C'était les vacances. Pas de conversation intéressante pour l'instant. On s'arme, on s'équipe. On distribue les rôles. Kuzda et Shouri servent de sniper. Ils laissent tomber leur stuff lourd pour les troquer contre des petites affaires, résistantes, mais pas faites pour la mêlée. Gontran sera tank, d'après ce qu'on comprend. Ça lui colle à la peau, il adore ça. Dauphin, lui, choisit la défense. Comme d'habitude. Il sera avec Belphe. Comme d'habitude.Les stuff sont communs. Chacun se sert comme il veut, du moment qu'il le rend après. S'il veut le garder, il l'achète, et l'argent est versé sur le compte commun du groupe, servant aux réparations, aux restaurations, et à l'amélioration du stuff. Ça marche très bien comme cela, et personne de la guilde n'a jamais cherché à s'opposer à ce fonctionnement, parfait. Tout le monde est prêt, on peu commencer.

- Dymas!

Réalité brutale.

- Qu'est-tu veux? J'suis en raid, là.
- Je sais, mais regarde! Regarde!
- Qu'est-tu me chies, là...? C'est quoi?
- Roh, me dis pas que tu sais pas c'que c'est!
- J'te laisse être déçu ou tu accouches?
- C'est le manuel d'islandais que j'ai commandé la dernière fois!
- Ah... Ah parce que maintenant c'est l'islandais, ton délire?
- Mais oui! Ça a l'air trop bien!
- Stu le dis... Ça se parle où, l'islandais?
- Bah, en Islande.
- Et?
- J'sais pas, en Islande.
- J'me disais, aussi.
- Mais quoi?! Il me faut apprendre le plus de langues possibles!
- Non non non, TU te forces tout seul à apprendre n'importe quoi, nuance.
- Roh, tu m'énerves!

Interruption momentanée, puis retour à la mission. On lui demande qui c'était, il répond qu'il s'agissait d'un ami. Il ne ment pas. Belphe s'énerve progressivement. La zone est vraiment tendue, il s'agit maintenant de ne pas se faire prendre en embuscade. Elle demande à la moitié du groupe de défense d'aller à la limite de la Z3, pour protéger leurs arrières. Dauphin quitte sa pupille, dirige les autres.
Et est séparé de Belphe.

- Ça fait combien de jours que t'as pas changé de tee-shirt?
- T'occupes, dégages, je joue.
- Trop aimable, hein...
- T'avais pas de l'islandais à apprendre absolument ou j'sais pas quoi?
- J'ai aussi une lessive à faire. Et j'la f'rais pas tant que ton haut ne sera pas dans la panière de linge sale.
- Putain t'es chiant j'te jure.

Et il râle. C'est son grand truc. Le pétard est déposé dans le cendrier où végètent déjà trois cadavres calcinés d'on ne sait trop quoi. Le paquet de tabac et son ouverture béante juste en face. Le casque est retiré, posé à ses côtés. L'effort suprême de se mettre torse nu. Il ne lui tend pas Marilyn Manson. Il vise, jette. Et vise de travers, jette à côté. Léandre soupire, se baisse, ramasse le morceau de tissu.

- Tu vois Dy', c'était pas si compliqué.
- Mon cul, ouais, y pèle dans la piaule.
- Y pèle, ça va pas? Il fait au moins trente degrés, c'est une vraie fournaise! Non mais ça va pas bien, toi...
- Ouais, et si Sa Majesté Léandre Premier voudrait bien me foutre la paix pour que j'puisse raidir quelques enfoirés, c'possible?
- Roh, j'me casse, j'me casse. Tu veux quoi à bouffer?
- Chais pas, une pizza.
- Bah ça m'aurait étonné, tiens. Tu diras bonjour à Syndel de ma part, hein?
- Yep.

Il ne le fera pas. Il ne le fait jamais.
S'il ne remet pas son sweat, il reprend la roulée. Hors de question de la laisser moisir après le temps qu'il a mis pour la fabriquer. Elle est parfaite. Fine, élégante, délicate, vraiment, parfaite. Il suffit de la rallumer, de se concentrer à nouveau sur l'écran et le clavier. Reposer le casque sur son crâne. Les entendre parler, rire, monter dans les décibels. La situation est bordélique. Il y a eu des morts, sans doute. Sur la carte, il n'y a plus que cinquante points rouges. Douze. Plus grand monde dans le second groupe de défense.

- Hé, Belphe? Belphe! Elle est où les gens?

Elle re, t'inquiète.
Là, elle a du travail.

- Tu vois, ça ? C'est des galons, dans la Grande Armée de Mirana Chantebois. J'suis générale, eh ouais. Le problème, c'est que je me suis retrouvée ici, j'sais pas comment. Alors puisqu'on m'a dit de m'adresser à toi, tu vas me dire où je suis, pourquoi, et surtout, comment rentrer dans le FIVE, parce que voir vos tronches de cake, habillés comme des clowns, ça me donne juste envie de bastonner les murs.

Silence. Perplexe.
Ses traits, et aucun mouvement. Aucun moyen de savoir si elle s'en fout ou si elle est fascinée. Juste, stoïque. Le regard droit dans celui de son vis-à-vis. Grande. Visiblement, une vingtaine d'années. C'est trompeur. Elle parle avec l'assurance de quelqu'un qui aurait vécu quarante ou cinquante ans. Une voix qui, si elle n'avait pas été aussi sauvage, aurait été sage. Des ordres. Elle lui adresse des ordres qu'on ne peut discuter. Elle est générale. De l'armée de Miranda quelque chose. Parce que nous sommes en guerre, bien évidemment. Contre les rouges, parce qu'ils guettent toujours, tapis dans un coin, les fourbes. Ce n'était pas une plaisanterie. Elle en mentait pas. Elle ne riait pas. Sérieuse. Va s'asseoir. Attend ses réponses, parce qu'elle ne partira pas sans. Si le lycée avait connu des cas, elle en faisait d'office partie. Mais, ce n'était pas comme si elle faisait partie du lycée en temps que tel. Se retrouver ici par hasard est impossible. Sans doute a-t-elle été conduite ici. Elle a du, très certainement, arriver ici car quelque chose la lie au château. Ce n'est pas un esprit. Elle a fait attention en s'asseyant. Il y a des choses ici qui ne sont pas adaptées à sa condition. Elle n'est pas à l'aise, malgré son timbre indiscutable. Elle n'est clairement pas en position de force. Une sauvage. Une amazone, peut-être.
En tous les cas, pas quelqu'un du coin.
Quelqu'un du F.I.V.E.

- Alors, tu accouches ?

Non, elle n'accouche pas. Et ça la blesse.
Ses yeux se baissent, elle se tourne vers l'écran.

- Approche-toi.

Active la souris. À partir du noir, les couleurs se forment. Le jeu revient. Le chat s'actualise. Echap. Nouvel onglet. F-I-V-E.

- Cette machine, là, ça s'appelle un ordinateur. Et t'expliquer tout ce qu'on peut faire avec relève du suicide, ou faut vraiment ne rien avoir à foutre d'autre. Le truc, là, que tu prends pour un casque anti-froid, c'est ce qu'on appelle un casque microphone. Je peux entendre et parler avec les gens qui sont eux aussi devant un ordinateur et qui possèdent un casque microphone.

Aucun résultat. Enfile le casque. Devient Belphe.

- Re.
- Ah, Belphe! Putain, j'savais pas qu't'étais en difficulté, merde, j'l'aurai su j'aurai...
- Ouais, Dauphin, moi aussi, mais attendez les mecs j'ai besoin de vous là.
- Qu'est-c'qui t'arrive?
- Un d'entre vous connaîtrait pas un truc qui s'appelle FIVE, ou le FIVE, le monde du FIVE...?
- Attends deux s'condes...
- Cherches pas, c'est pas sur le net.
- Ah, bon ben j'connais pas.
- Moi non plus.
- Génial.
- Attends meuf j'ai quelqu'un avec moi qui doit connaître!

Il enlève le casque, pose la roulée, coupe le micro.

- Léandre! Léandre, rapplique fissa!
- Quoi? Qu'est-ce qu'il t'arrive?!
- Tu connaîtrais pas un genre de truc qui s'appelle le FIVE?
- Bah, ça me dit quelque chose... Attends j'appelle Enée, il doit être avec Lysandre et lui il pourra confirmer.
- Laisse tomber mec, on n'a pas l'temps. Dis c'que tu sais on verra bien.
- Il m'semble que c'est un bouquin, en fait. L'auteur avait caché le livre, et on l'a retrouvé y'a pas longtemps, un exemplaire unique. Mais bon, le livre est illisible vu qu'il est très vieux et que l'écriture, les feuilles, tout ça, ça s'est abîmé avec le temps tu sais, normal. J'te dis, Lysandre doit en savoir plus, me souviens qu'on m'en avait parlé mais... Hé, Dymas? Dymas, tu m'écoutes même pas!
- Hé Belphe!
- T'as un truc, Do'?
- Apparemment ce serait un bouquin, en fait.
- Sérieux? Attendez, je re.

Pose tout. Se tourne vers l'inconnue. Les yeux dans les yeux. Pas un sourire.

- J'crois que j'ai compris.

Le moteur de recherches de la bibliothèque. Pas de réponse. Celui des archives. Pas de réponse. Ne désespère pas.

- Parle-moi de ton truc, s'il te plait. Et peut-être que j'pourrais t'aider.

Elle ne mentait pas. Elle était, vraiment, à votre service.
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Dara Summers
Dara Summers
MessageSujet: Re: Appréhension. [Dara.]   Appréhension. [Dara.] EmptyJeu 22 Nov 2012 - 23:54

    Inspire, expire.
    Inspire, expire.


    OUF.

    En fait, j'étais complètement perdue dans cet endroit. Ce n'était pas mon univers, ce n'était pas ma manière de vivre, pas mon mode de fonctionnement, encore moins celui qui me permettait de survivre. Encore moins tout ce que je ressentais à l'égard du FIVE. Mon attirance puissante pour ma patrie, pour mon pays, l'amour inconditionnel et emprunt d'une dévotion sans faille que je nourrissais pour la Reine Déchue. L'amitié de Ninon, bien que douce et patiente, j'en étais l'exacte opposée. Comme elle, je n'éprouvais que de la haine envers Sôbek, l'Intendant d'Escarbia. J'étais une des rares représentantes de ma race auprès de la reine Mirana. Les autres avaient choisi la neutralité, dans ce fratricide qui opposait quatre nations sur cinq. Et moi évidemment, j'étais l'une des rares hybrides à accepter ma différence d'opinion, pour combattre aux côtés de la rebelle. Sans doute d'autres avaient choisi le chemin inverse. Sans doute avaient-ils choisi la valeur sûre : les Elfes. Les putains d'Elfes. Ils me répugnaient. Niais. Stupides. Bouffeurs de feuilles, vénérant les Hydriades et les Epygées comme si elles étaient des déesses vivantes. J'avais rien contre celles qui partageaient la mer avec les Sirènes. Mais je ne supportais plus la forêt de Crystallix. On ne peut pas faire un pas sans croiser une gonzesse à moitié à poil, des feuilles coincées dans les fesses. Aucune pudeur. Le pire, c'est qu'elles se croient supérieures.

    Des vraies garces.

    En fait, ma réflexion décousue sur mon monde n'eut d'autre effet que l'inverse de ce à quoi j'aspirais ; à savoir me calmer. Repenser à Mirana, à Ninon, à Sôbek, et même à ce sale couard représentant notre race, Damian, provoquait en moi une sorte d'acidité telle que pendant un laps de temps très court, j'eus du mal à respirer. Pourquoi étaient-ils absents ? Même voir un Berserk suffirait à me rendre heureuse. Un gros berserk puant l'alcool à plein nez. J'étais prête à le faire. Vraiment. J'étais prête à taper le bout de gras avec ce genre de type, pourvu que son environnement soit le même que le mien.

    Non parce que la frigide, là, elle avait l'air complètement déconnectée.

    En fait, j'ignorais totalement si elle avait prêté attention à ce que je venais de lui dire, ou si elle s'en tamponnait l'oreille avec une babouche. Je me contentais de la fixer, longtemps. Et ce jusqu'à ce qu'elle se décide à me répondre. J'avais l'autorité naturelle, dans le sang. Je savais me faire obéir. Même Damian, notre Chef de Race, pourtant plus haut gradé que moi, savait à quel moment fermer sa grande bouche quand la mayonnaise montait. De toute façon, lui, c'était un vrai lâche. Une lopette. Il avait demandé la neutralité par trouille pure et simple. Pas étonnant que son Totem fut un renard. Aussi vicieux les uns que les autres.

    Heureusement que je ne le voyais pas beaucoup, celui-là.


    - Cette machine, là, ça s'appelle un ordinateur. Et t'expliquer tout ce qu'on peut faire avec relève du suicide, ou faut vraiment ne rien avoir à foutre d'autre. Le truc, là, que tu prends pour un casque anti-froid, c'est ce qu'on appelle un casque microphone. Je peux entendre et parler avec les gens qui sont eux aussi devant un ordinateur et qui possèdent un casque microphone.


    STOP.
    Arrêt sur image.
    or-ti-ta-teur.
    Mi-cro-zone.

    J'attrapais mon front du bout de mes doigts, plissant mon visage pour enregistrer la première information un tantinet potable qu'on me servait depuis mon arrivée. La blondasse répondait au moins à mes interrogations, c'était un point positif. Peut-être avait-elle compris qui j'étais. Peut-être connaissait-elle le FIVE. Mais mes interrogations à ce sujet furent vite balayées, lorsque ses doigts se mirent à taper sur une sorte de barre noire avec des lettres inconnues dessus.

    A FIVE, on l'aurait déjà cramée, celle-là.
    C'était sans doute pour cela que j'avais radicalement refusé de lever mes fesses de la chaise sur laquelle je venais de m'asseoir, pour la rejoindre. Hors de question de m'approcher de ton Torlisateur. Sans blague.

    - Re. [...] Ouais, Dauphin, moi aussi, mais attendez les mecs j'ai besoin de vous là.

    Elle recommençait à parler toute seule, cette tarée. Non, je n'avais pas du tout assimilé le fait que si elle causait dans ce truc qu'elle avait sur les oreilles, quelqu'un d'autre l'entendrait. Parler à un Dauphin en plus ? Non mais ça allait pas mieux hein !

    - Un d'entre vous connaîtrait pas un truc qui s'appelle FIVE, ou le FIVE, le monde du FIVE...?


    Elle se renseignait. Mais je voyais mal comment elle pourrait se renseigner sans livre, sans quelqu'un pour l'aiguiller. Elle était vraiment étrange. Je commençais à m'agacer. Ma main se crispa sur ma cuisse, geste défensif. Faites que je me transforme pas, juste. Mais déjà, je sentis les moustaches de Caracal traverser mon épiderme pour naître sous mon nez.
    Et merde.

    - Cherches pas, c'est pas sur le net. Génial.

    Sans commentaires.
    Le temps qu'elle finisse de parler toute seule, mes oreilles avaient déjà atteint le stade ultime, traversant mes cheveux noirs. Des oreilles félines, terminant par des pinceaux. C'était assez joli, certes. Mais si je me transformais, je ne pourrais pas parler. Or, il fallait que je lui parle.
    Concentre-toi.

    Et puis...

    - J'crois que j'ai compris.


    Entretemps j'avais caché mes moustaches derrière mon foulard. Dissimulé un maximum mes oreilles. Malheureusement, déjà mes yeux changeaient de forme. Et j'avais une truffe féline.
    Si bien que l'odeur de l'inconnue agressa mes narines, et je me mis aussitôt dans une position défensive, sur le qui-vive. Je n'entendis même pas la suite de sa phrase.

    "Tu es un démon !"


    Je ne vous avais pas dit que si je rencontrais une race connue, je lui sauterais au cou ? En l'occurrence, ce n'était pas un berserk, mais pire. Un démon. A l'odeur très différente de ceux qui vivaient à Escarbia, mais c'était une démone, j'en étais persuadée. Mes sens félins en alerte, je la fixais, ahurie. J'avais deux théories. Soit elle venait du FIVE, et elle me prenait pour la dernière des débiles. Soit elle était vraiment d'ici, et c'était ce qui différenciait son odeur de celle connue de mes narines. Alors quel était le lien ? Etait-elle aussi méprisable que les descendants du Roi Delmar ? Pour l'heure, je l'ignorais. Mais il fallait que je reste sur mes gardes. Elle était de la même race que Sôbek, et River seule savait quelle ordure ce type était. Peut-être ferait-elle exception. On ne sait jamais. J'étais tout de même contente d'avoir au moins un petit repère. Sous la pression de mon excitation, mon foulard retomba mollement sur mon cou, révélant moustaches et museau animal.

    "Alors il y a des démons ici aussi, c'est ça ?"

    Question conne.
    Je pris un second souffle, calmement, pour m'assurer que tout cela était bien réel. Oui, ça l'était.

    - Bon, qui que tu sois, de toute façon ça change rien. Je viens de FIVE. J'étais partie chasser du côté d'Adamantis, et puis j'ai été... J'sais pas bien. Entraînée dans une sorte de tempête, près du cratère d'Eronest. C'est bizarre, d'ailleurs, parce que normalement il ne se passe rien là bas. C'est là que ces salauds d'Alicantes foutent les cadavres humains. Bref, quand je me suis réveillée, j'étais dans la ville, là, en bas du château. Je me suis dit que j'aurais peut-être des réponses ici, on sait jamais.

    Je commençais à me détendre. Mais mon regard perçait les défenses de la jeune femme. Ne jamais sous-estimer un démon. C'était une règle à laquelle jamais je ne me dérobais.

    "Le type dans la boutique de livres m'a dit que j'étais sortie d'un vieux volume, parce qu'un mec aurait prononcé une formule magique. Moi, j'y crois pas. A mon avis il a dit ça sous la torture. Je tape et je pose les questions après."
    dis-je avec un sourire sauvage, dévoilant mes canines à présent pointues. Elles dépassaient de mes lèvres à présent.

    "Bon alors, ta machine miracle, là. Ton Totornadeur. Il va me dire d'où je viens ou pas ? T'as qu'à lui donner mon nom au pire. J'm'appelle Dara Summers. Hybride."

    Enchantée. Ou pas.
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Appréhension. [Dara.]

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