Le chant des oiseaux, les premières lueurs du jours qui entraient dans la pièce et l'éclaire suffisamment pour ne pas avoir besoin d'allumer l'ampoule dégarnie qui pendouillait au plafond. Il y avait du mouvement dans cette chambre, deux jeunes filles se préparaient pour se rendre en cours. Une dernière qui flemmardait dans son lit, se retournant toutes les deux minutes. Elle s'enroulait dans son duvet: nous étions au début du mois de juin, mais au matin l'air restait tout de même frais. Ses colocataires s'activaient, elles l'appelaient pour l'inciter à se lever enfin, malheureusement elles obtenaient l'effet inverse. Le matin, Night avait toujours de la peine à quitter son lit, c'était ce qu'elle faisait croire à ses amies depuis quelques temps. En vérité, elle attendait qu'elles partent pour qu'elle puisse ensuite s'habiller sans qu'elles ne restent rivées sur son bras. De la pitié, voilà ce qu'il y avait au fond de l'œil des gens lorsqu'ils la regardaient. La magicienne en avait plus qu'assez! Cela faisait des mois que cela c'était produit et tout le monde y pensait encore en la voyant. Au début elle laissait ses blessures apparentes, puisque tout le monde savait ou allait savoir, elle s'en fichait,mais elle remarqua que les autres ne cessaient de fixer son coup, seule partie que l'on voyait puisqu'à ce moment-là, c'était l'hiver et son bras était caché par la manche. Ne portant pas de col roulé, elle porta une écharpe tout le reste de l'hiver. Puis le printemps arriva, ce qui posait problème: elle ne pouvait plus porter de pull, il faisait bien trop chaud. Elle trouva une solution, celle de porter des petites jackets par-dessus ses t-shirts. C'était parfait. Et nous le savons bien, après le printemps, c'était l'été. Là, c'était un nouveau problème pour la jeune fille. Paniquée, elle alla demandé de l'aide à l'infirmière. Celle-ci lui proposa de porter ces gants qui remontent jusqu'à mi-bras.

"Mais je vais avoir trop chaud," répondit Night.

"Non, il en existe en dentelle, c'est une matière très fine et ils sont très beau," dit l'infirmière.

La tigresse fut obligée de porter des gants si elle voulait que les gens la regardent comme une jeune fille ordinaire. Elle se rendit rapidement en ville et acheta un bon nombre de paires de gants, ainsi que quelques t-shirts aux manches courtes mais un peu ample et aussi des écharpes en soie pour cacher son coup. Elle était parée pour l'été, même s'il lui arrivait d'avoir un peu chaud avec tout ce tissu.

Ce matin-là elle enfila une jolie robe blanche aux manches légèrement retombantes, glissa ses petites mains dans les gants en dentelles et enroula une écharpe autour de son coup. C'était devenu un rituel et une tenue de tous les jours. Les autres savaient bien pourquoi elle portait tout cela: à présent, ils discutaient et se comportaient normalement avec elle. Night était ravie. Il était étonnant de constater à quel point les gens s'arrêtaient à l'aspect physique. Elle qui croyait que les non-humains regardaient au-delà des apparences...

En fin de journée la magicienne regagna sa chambre: la journée c'était bien déroulée, banale certe, mais agréable. Elle avait rit avec ses amis et c'était le principale. Elle entra dans sa chambre, toute joyeuse. Elle était seulement venue poser son sac, elle retournait dehors dans le jardin avec les autres pour partager un matche de foot. Et oui, les magiciens et les démons aussi jouent au football. Dans son élan, elle n'avait pas remarqué la lettre qui était posée sur son lit: une enveloppe blanche. Lors qu'elle referma la porte en partant, cela créa un courant d'air et le papier s'envola. Il se posa par terre, à un mètre du matelas. La lettre resta ici jusqu'au soir.

Vers 22h30, la tigresse rejoignit sa chambre. La pénombre l'accueillit. Elle traversa la pièce jusqu'à sa table de chevet pour allumer une petite lumière, histoire de ne pas trop attirer les moustiques. Quand l'ampoule s'alluma, l'enveloppe ressortait sur le sol. Night la remarqua tout de suite, elle se pencha pour la prendre. Instinctivement, elle s'assit sur le bord de son lit, elle observa le papier un peu ternit, elle tourna l'enveloppe dans ses mains emprisonnées par les gants en fine dentelle blanche. Là, son cœur fit un petit saut: son nom était inscrit, d'une écriture un peu psychédélique. Intriguée, elle l'ouvrit, celle-ci n'était même pas scellée. Elle saisit le papier, terne lui aussi, il était plié en deux. Elle lui rendit sa forme. Comme à chaque fois qu'elle reçoit une lettre, Night ne sait jamais où il faut regarder en premier tant elle est excitée. Là ce n'était pas très compliqué, il n'y avait que quelques lignes d'inscrites au centre de la feuille, toujours avec cette écriture un peu psychédélique.



Elle resta sans voix, à la fois effrayée, surprise, heureuse, émue....tout ce mélangeait dans sa tête...

Son cœur battait à tout rompre, elle pensa à un canular, mais personne ne savait qu'elle avait été amie avec Keith. De plus, la dernière phrase, avec la lettre K... Sans un mot, elle s'allongea dans son lit, ramena le duvet sur ses jambes et colla le papier contre elle. Se calmer réfléchir à ce qu'il était en train de se produire. La jeune fille ne ferma pratiquement pas l'œil de la nuit.


Le jour annoncé dans la lettre arriva. L'esprit de la tigresse fut troublé, elle était impatiente, inquiète, angoissée... Elle essaya pourtant de se comporter normalement, mais ses amis remarquèrent qu'elle n'était pas dans son assiette.


"Hey, tout va bien Night?" Demande l'un d'eux. "Tu sais qu'on est là pour t'écouter si jamais quelque chose cloche."


La magicienne leur adressa un petit sourire.


"Merci les amis, je vous assure que tout va bien, je suis juste un peu fatiguée", conclu-t-elle.


Le soir, elle alla sa coucher avant ses colocataires: sous son duvet, elle était habillée, prête à sortir cette nuit. Personne ne devait la voir sortir et encore moins savoir où elle se rendait. Elle fit semblant de dormir, même si à plusieurs reprises elle faillit basculer dans le sommeil. La lumière s'éteignit, il n'y avait pas un bruit, c'était si silencieux, les yeux écarquillés dans les ténèbres. La jeune fille voyait l'obscurité s'intensifier, s'habituant à la pénombre, elle percevait des formes, connaissant la chambre, elle identifiait facilement les meubles. Le temps semblait long, il lui paraissait une éternité et pourtant à chaque fois qu'elle regardait son réveil: seul cinq malheureuses minutes s'étaient écoulées. Et ce fut ainsi jusqu'à 22h00.


Doucement, elle quitta son lit, sans faire de bruit elle referma la porte derrière elle. Grâce à son côté félin, ses pas ne résonnaient pas dans les couloirs désertiques. Son cœur était oppressé, la peur de croiser quelqu'un l'empêchant de pouvoir se rendre au lieu de rendez-vous. Elle descendit une première série d'escalier, elle allait arriver dans le hall d'entrée mais des voix la stoppèrent au milieu des marches, des gens venaient dans cette direction. Elle rebroussa rapidement chemin, regagnant le premier étage. Elle se colla contre un mur, le cœur tambourinant contre sa poitrine. Elle regarda sa montre: 22h15. Dans la même main elle serrait fortement le papier, elle n'avait put se résoudre à le détruire. Elle attendit quelques minutes, en espérant que les personnes dans le hall partiraient. Malheureusement, ils ne semblaient pas décidés à quitter le lieux. Prise de panique elle chercha une alternative. Une folle idée lui traversa l'esprit.


En haut des escaliers, au premier étage, un petit salon nous faisait face, la fenêtre était ouverte. Night passa la tête au dehors, analysant la hauteur, sur le côté un lierre grimpant: il avait robuste. La jeune fille escalada l'encadrement et s'accrocha aux racines épaisses du végétal. Doucement elle descendit contre la façade, manquant plusieurs fois de finir écrasée comme une crêpe au sol. Son bras gauche ne lui rendait pas la tâche facile. Lorsqu'elle fut à deux ou trois mètres du sol, elle s'élançant dans le vide, ses réflexes de féline agirent: elle se tourna contre la pelouse à mi-chute, ses jambes et son bras droit amortirent son atterrissage. Elle regarda à nouveau sa montre:22h40. Le temps pressait. La magicienne se mit à courir en direction de la ville. Lorsqu'elle arriva à la place centrale, elle s'arrêta pour respirer, cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas autant courut. Elle aurait été bien plus rapide sous sa forme de tigre mais elle n'osait plus se transformer à cause de sa blessure. L'horloge de la place indiquait 23H15. Night n'avait aucune idée d'où se trouvait l'église, elle ne s'y était jamais rendue. Elle regarda autour d'elle à la recherche d'un clocher ou d'une croix.


*Là!!*


Elle suivit la croix qui se dessinait dans le ciel noir. Elle arriva au pied de trois marches, puis une grande porte en bois, de magnifiques vitraux bordaient l'entrée. Elle poussa la lourde porte et entra. Des cierges étaient allumés autour de l'autel. Il faisait frais dans cet endroit, dehors la chaleur régnait encore. Night s'avança vers l'autel, tenant d'un main son pendentif: ce n'était autre que la pierre que Keith lui avait donnée pour démasquer les possédés, elle l'avait fait monter sur pendentif pour ne pas s'en séparer. Dans l'autre, le papier ternit était complétement froissé, serré entre ses petits doigts. Ses pas s'arrêtèrent au même niveau que les premiers bancs. Un courant d'air souleva ses cheveux orangés. Un frisson parcourut son échine dorsale.


"Keith?" Dit-elle dans un murmure.